“Little Pétra”

À 8 km au nord de Pétra, se trouve le parc archéologique de Siq al-Barid¹, surnommé Little Pétra. On y accède par un étroit canyon de 400 m, le Siq, qui s’ouvre entre les rochers de grès, sans être inondé de lumière. Sa création remonte au Ier siècle av. J.-C., lorsque Pétra était déjà puissante.

Little Pétra (CC)

Le site archéologique est constitué de monuments impressionnants, qui lui ont valu la mention de little Pétra. Les Nabatéens y construisirent surtout des habitations et des commerces. Mais le long du canyon se trouve au moins un temple sculpté dans le grès rouge, accessible par un escalier en pierre. Quatre tricliniums avaient été construits de part et d’autre du temple, et constituent l’attraction principale du site. Il s’agit d’édifices à colonnades, comportant une salle fournie d’une table à manger et de trois lits où les gens s’allongeaient pour manger. C’est là que les les marchands bédouins se restauraient avant de reprendre la route  avec leurs caravanes. Les fouilles ont permis de dégager un biclinium, une salle à manger pour deux seuls convives. Elle est aussi connue comme ”Painted House”, à cause des peintures qui se sont conservées sur son plafond. On y voit encore des oiseaux et des vignes.

Little Pétra se trouve près de plusieurs anciennes routes caravanières où passaient les marchandises qui reliaient l’Arabie Saudite à la Méditerranée et aux autres régions du Proche-Orient ancien. Les marchandises -essentiellement l’encens, la myrrhe et les aromates- étaient transportées par les dromadaires. Dans l’économie nabatéenne ces animaux constituaient une ressource importante, même si on ne connaît pas encore bien l’organisation de ce commerce.

Route de l’encens (CC)

Le commerce est la raison de l’essor des Nabatéens. Ils apparaissent dans les sources écrites classiques déjà à la fin du IVe siècle av. J.-C.² comme des Arabes enrichis par le commerce.

Royaume nabatéen (© L. Nehmé)

Les Nabatéens sont un royaume qui aux premiers siècles avant et après J.-C. dominait la Syrie du sud, la Jordanie, l’Arabie Saoudite nord-occidentale, le Negev et probablement le Sinaï. Ils avaient leur propre écriture³, leurs propres monnaies à l’effigie de leurs rois et de leurs reines, leur propre céramique fine très particulière et leur art et style originaux.
La capitale était Pétra, composée d’un centre officiel monumental et des maisons aux murs recouverts de peintures, aujourd’hui ville inscrite sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1985. La ville comprends aussi des maisons, des nécropoles et plusieurs temples. Une autre ville importante à la frontière sud du royaume était Hégra, aujourd’hui Madâin Sâlih. Elle se trouve à 300 kilomètres au nord-ouest de Médine, grande ville provinciale, poste militaire et station caravanière. L’architecture, la culture matérielle et l’écriture sont nabatéennes même si la brique crue est le matériel de base (et non le grès de Pétra).

En 106 ap. J-C., les Nabatéens furent conquis par l’empereur romain Trajan et ils formèrent la nouvelle province romaine d’Arabie. Ils ne disparurent pourtant pas complétement: des noms nabatéens continuèrent à exister jusqu’à VIe s. ap. J-C., de même que leur céramique. Le legs le plus durable que les Nabatéens ont laissé est leur écriture, l’ancêtre de l’écriture arabe.

1. qui signifie en arabe « canyon froid » [↩]
2. l’historien grec Diodore de Sicile mentionne une expédition menée contre eux à cette époque [↩]
3. aujourd’hui il y a dans le monde une vingtaine de chercheurs capables de traduire cette écriture [↩]

Laura Battini

Chargée de Recherche au CNRS (UMR 7192 – PROCLAC, Paris), spécialiste d’architecture et d’iconologie syro-mésopotamienne

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